#CoucouJexiste, la campagne qui parle des sujets oubliés des grands médias

Loin des yeux, près du cœur. Que s’est-il passé cet été ? Je ne suis pourtant partie en vacances que 9 jours, déconnectée (ou presque) des réseaux sociaux et de l’actualité de mon pays. Or, pendant que mon smartphone faisait une pause au fond de mon sac, une fièvre s’est emparée des Français autour d’un vêtement, créant un débat aussi peu flatteur que la tenue en question. Pour ma part, j’attribue ces semaines d’égarement au dérèglement climatique. On a tous eu chaud, puis froid, puis chaud. Cela n’aide pas à garder les idées claires.

Ce qui n’aide pas non plus, c’est le manque de discernement de nos politiques. Touchés de plein fouet par le réchauffement de la planète, ils sont devenus court-termistes. Comment expliquer sinon qu’ils se soient jetés avec tant de ferveur sur cette polémique ? Ont-ils si peu de sujets à traiter ? Je les imagine feuilleter leur agenda vide en se demandant comment meubler leur été. Soumis en permanence au besoin impérieux de s’exprimer, ce podium leur a semblé remplir tous les critères. Bref, quelles que soient les raisons de cet épisode humiliant, nous n’avons pas été déçus du spectacle.

Mais nos représentants n’étaient pas seuls sur ce char bruyant de la prise de parole inutile. Ils étaient soutenus et encouragés par les médias, dont les Unes semblent désespérément vouloir toucher la corde sensible d’une France encore meurtrie par les attentats.

Or, ce débat créé de toutes pièces s’est révélé très utile. Il était le flamboyant palmier qui cache la jungle des sujets véritablement brûlants de l’été.

Pendant que la société française débattait ardemment sur la (bonne) tenue des femmes, la Loi Travail était adoptée. Un groupuscule de députés proposait en douce un projet de loi visant à maintenir le cumul des mandats. Bure était le théâtre d’un bras de fer entre une entreprise pressée d’y enfouir ses déchets nucléaires et des citoyennes et citoyens outrés. L’avenue de Flandres prenait des airs de Paris sous l’Occupation, avec les rafles incessantes des réfugiés (dont on ne sait décidément pas quoi faire). Et n’oublions pas que quelques temps plus tôt, un jeune mourrait le soir de son anniversaire, étouffé dans un camion de gendarmes.

Puis je suis rentrée de vacances, et j’ai reconnecté avec l’actualité de mon pays. Exit le burkini, place à une nouvelle Une, censée créer la surprise : Macron. On ne l’avait pas vu venir celui-là ? Personnellement, cet air satisfait en costard qui me fixait à tous les coins de rues, c’était l’outrage de trop. Ce genre de moment médiatique donne envie de s’isoler dans une grotte pour y passer l’année à venir. Sincèrement, qu’avons-nous fait pour mériter ça ?

Car derrière les ruades de nos politiques entièrement occupés à redorer leur image, derrière les gros titres d’une presse qui peine à se réinventer, revient la longue file des sujets invisibles. En ce temps de rentrée des classes, il y a toujours plus d’1 million d’enfants précaires, dont l’avenir scolaire est déjà compromis avant d’avoir commencé. Et ce n’est pas tout. D’une main, le Ministère de l’Intérieur tweete allégrement une bonne rentrée aux jeunes Français, de l’autre, il essaie de battre le record d’enfants réfugiés placés en centres de rétention. Ce mouvement contradictoire s’apparente à une claque, si on y regarde de plus près.

Nous accumulons un retard sur des questions que nous ne pouvons plus ignorer. Pourquoi passer sous silence les véritables sujets qui devraient nous préoccuper ? Parce que c’est moins vendeur ? Trop déprimant ? Pas intéressant ?

En lançant une campagne intitulée « Coucou j’existe », nous avons voulu redonner corps et vie à ces sujets qui devront de toute façon être pris en charge.

Nul besoin d’être militant(e) pour s’emparer de l’invisible. Cet été a été marqué par une belle victoire du mouvement anti-nucléaire, avec la chute du mur érigé par l’Andra à Bure. Suite à la fronde populaire qui a réuni des centaines de citoyennes et citoyens, l’agence a désormais 6 mois pour réhabiliter la forêt qui a bien failli se transformer en poubelle nucléaire. Aujourd’hui, les élus franciliens s’apprêtent à lancer la reconstruction de l’incinérateur d’Ivry Paris 13 (IP13), brûlant ainsi 2 milliards d’euros. Pourtant, un projet alternatif citoyen existe : le Plan B’OM, un programme audacieux dont les 12 mesures peuvent nous amener vers le zéro-déchet.

Ce n’est pas parce qu’ils sont invisibles que les sujets de notre temps cessent d’exister. Loin des yeux, près du cœur, notre rentrée commence et elle est pleine de promesses.

A.R

Crédits photos:

  • ED-Plage08 cailloux: Nuit Debout / DR

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