Fin de campagne électorale, début de l’engagement citoyen

Pendant trois mois, le site Miroir 2017 a mis en lumière les nombreuses initiatives de la société civile face aux vaines promesses des candidats. Aujourd’hui, la campagne est terminée, mais l’engagement ne fait que commencer ! Découvrons les raisons qui ont poussé les bénévoles de Miroir à s’investir dans ce projet. 

La campagne présidentielle s’achève, et avec elle notre contre-campagne. Pendant 3 mois, nous avons voulu mettre en lumière les innombrables initiatives de la société civile pour bâtir un monde meilleur. Aux nombreuses promesses des candidats, nous avons opposé les actions concrètes des citoyen.ne.s. Pourquoi ? Parce que les temps changent. La percée du vote blanc n’est que la partie visible de l’iceberg. On les compte par dizaines de milliers, ces citoyen.ne.s qui oeuvrent au quotidien pour préserver l’environnement, changer les habitudes de consommation, travailler mieux, lutter pour l’égalité hommes-femmes, se soigner différemment, etc.

Les envies foisonnent et prennent forme : envie de sortir d’une Ve république à bout de souffle ; envie de stimuler le débat public ; envie de démocratiser l’accès à la culture et aux arts ; envie d’en finir avec la corruption politique ; envie de recréer du lien humain ; envie d’enseigner autrement ; envie de vivre dans un environnement plus sain ; envie de réduire les inégalités et les discrimations ; envie de s’épanouir au travail ; envie de s’engager.

Dimanche 14 mai, nous aurons un nouveau président de la République. Celui-ci s’apprête à gouverner les Français.e.s avec une légitimité toute relative. Pendant ce temps, des milliers de citoyen.ne.s continueront de changer les choses à leur niveau contre ou à côté de son « projeeeet », pour le contester ou en combler les manques. Comme elles, comme eux, nous suivrons notre propre programme. Celui de l’engagement quotidien.

Mais qu’est-ce qui nous pousse à agir ? Après avoir mis en lumière des initiatives de la société civile, nous avons retourné le miroir sur les membres de notre équipe. Nous nous sommes interrogés sur ce qui nous a fait passer du « je suis contre » au « j’agis pour ». Qu’est-ce qui nous a motivé.e.s? En nous posant la question mutuellement, nous avons réalisé combien les raisons d’agir sont multiples.

A l’origine, il y a un point commun : nous ressentons un désaccord plus ou moins grand avec la société dans laquelle nous vivons. Ces injustices que nos représentant.e.s peinent ou refusent de combattre, quand ils.elles ne les créent pas de toutes pièces, ont allumé la mèche de notre rébellion. « Je n’ai jamais spontanément eu de révélation qu’il fallait agir, ça a plutôt été un enchaînement, le constat d’un décalage intolérable entre mes réflexions et la marche du monde. Je suis l’actualité depuis que je suis gamine. Regarder le monde en face sans détourner les yeux par flemme ou égoïsme est un credo personnel« , explique Emmanuelle.

Ce désaccord est nourri, selon l’histoire et les pratiques de chacun.e, par des lectures, des amitiés, des découvertes parfois fortuites, des recherches, des rencontres, comme par exemple pour Mehdi: « dans ma première boîte, je me suis trouvé pour la première fois face à des ouvriers. Un jour, au déjeuner, ça éclate : « Les politiques sont tous des pourris ! »Je marque mon étonnement et j’explique que le système peut se réguler, qu’il faut voter et ça marche tout seul. Ali,Pascal etJean-Pierre m’ont alors expliqué que face aux choix ineptes quis’offraient à nous pendant les élections, seule la reconnaissance du vote blanc permettrait de changer les choses. Quelque temps plus tard, je tractais dans les rues de Paris pour la reconnaissance du vote blanc ».

Un premier pas vers l’action commence parfois par une mise en accord de son mode de vie quotidien avec ce sentiment de désaccord et les idées qu’il produit. « Adolescente, poursuit Emmanuelle, je suis progressivement devenue féministe et écologiste au quotidien par éthique personnelle. » Militante au quotidien, Laury-Anne l’est aussi : « je crois foncièrement qu’on peut l’être. En refusant d’aller s’habiller dans les enseignes de fast fashion, en refusant  d’acheter des tomates en plein hiver, en recyclant tout ce qui nous tombe sous la main, en sensibilisant ses amis, ses collègues et ses voisins aux problématiques sociales et  environnementales. »

Pour la plupart d’entre nous, passer à l’action est une manière de se mettre en accord avec soi-même. Pour Agathe, le déclencheur a été un désir de se sentir utile et de s’ouvrir à d’autres réalités : « j’ai travaillé un an dans une association de sensibilisation à l’insertion professionnelle des personnes handicapées. Cela consistait à approcher des associations et des entreprises engagées sur le sujet pour faire une semaine de sensibilisation. Ca m’a fait beaucoup de bien, ouvrant mon horizon. J’ai compris que j’allais devoir me sentir utile pour être épanouie dans le futur. »

Construire un mode de vie qui nous convienne passe souvent par une remise en question de nos façons de consommer. « Je dirais que ce sont mes idées qui me donnent l’envie d’agir. J’essaye au quotidien de tendre vers la « consom’action » ou d‘acheter différemment (ou le moins pire possible) en connaissance de cause, comme quand j’ai acheté des chaussures « écologiques », quand j’ai clôturé mon compte à la Société Générale pour en ouvrir un au Crédit Coopératif, quand j’ai acheté un Fairphone et quand je m’abonne à des sites/journaux d’information alternatifs pour les soutenir financièrement », explique Angélique.

Mais vouloir adapter sa façon de consommer ne se fait pas toujours d’un claquement de doigt. « J’en avais assez d’enrichir des chaînes de supermarchés en faisant mes courses et je suis tombée sur le supermarché coopératif La Louve », se souvient Lison. Le passage à l’action peut donc nécessiter la rencontre d’une idée et d’un cadre où la mettre en pratique. « Autre exemple, je refusais de participer à des manifestations déclarées pour marcher d’un point A à un point B de façon un peu trop autorisée et j’ai entendu parler de Nuit Debout qui m’a permis d’exprimer ma contestation hors des clous. »

Pour Antoine aussi, pourtant politisé très tôt, le cadre adéquat était un pré-requis pour passer à l’action : « on a toujours beaucoup parlé politique chez moi, et c’était assez naturel d’avoir une opinion, une analyse sur ces sujets, même quand mon esprit n’était pas assez « formé » pour que ça soit pertinent. Je me souviens que je discutais déjà beaucoup politique en 2007, en  première, pendant l’élection présidentielle. Mais j’étais à la campagne, et « agir » était assez difficile. Dès que j’en ai eu l’occasion, et que j’ai trouvé le cadre qui me convenait, je suis « passé à l’action ». »

Passer à l’action ne se fait pas sans une dose de confiance et d’assurance. Emmanuelle a pris le temps ado de se « renforcer, comprendre, changer ses habitudes » avant de « progressivement parler aux autres quand je me suis sentie légitime. Un moment important a été celui où j’ai commencé à poster des articles et pensées féministes sur Facebook. On n’était que deux ou trois copines à le faire dans notre milieu. A l’époque les réactions étaient souvent violentes, alors quand l’une de nous postait, les autres se tenaient prêtes à la soutenir. On passait des heures à se relayer pour expliquer encore et encore le B.A.BA du féminisme. »

Ce sentiment de légitimité s’est construit à des rythmes différents pour chacun.e d’entre nous. Chez Sélyne, la légitimité de revendiquer l’égalité femmes-hommes a toujours existé : « Il y a bien eu des pétitions contre le massacre des bébés phoques au collège, mais je pense que ma première action militante a plutôt été de considérer les filles et les femmes les égales des garçons et des hommes, et ça depuis toujours. Faire du Rugby quand on me disait de faire de la danse, penser que rien ne m’était impossible du fait de mon genre, avoir les cheveux très courts en CE2, et ne pas tomber dans les pièges du patriarcat dans mes rapports avec les autres. »

Passer à l’action est émancipateur. Parce que c’est une réponse à une « sensation bouillonnante qu’il faut faire quelque chose », ça nous fait agir selon les règles qu’on se choisit, pas celles qu’on nous impose. « Je crois qu’au fond, j’ai toujours voulu changer les choses, ne jamais subir », explique Sélyne.

Ne pas subir, c’est plus facile à plusieurs, sans compter que rencontrer des pairs, prendre part à une confluence de désirs d’agir nous a souvent porté dans nos actions. Ce fut le cas pour Sarah : « quand j’étais lycéenne, je vivais concrètement les difficultés de mon lycée  et je voyais que les propositions de mon gouvernement allaient à  l’encontre de ce qui me semblait bon. Les discussions avec mes amis m’ont permis de voir que j’étais pas la seule, ça m’a donné envie d’agir. Ce que j’aime le plus dans ces actions, c’est les discussions, les réflexions pour trouver des solutions, parce que c’est bien de militer de dire que ça ne va pas, mais c’est encore mieux quand on réfléchit ensemble à comment aller mieux. » Idem pour Jean : « ‘ce qui m’a donné envie de passer à l’action, ça a été de voir la plaza Catalunya noire de monde en  mai 2011 et sentir qu’on peut non seulement gagner des batailles mais  surtout modifier durablement l’imaginaire collectif ».

Régis et Sélyne racontent eux aussi l’importance du collectif dans leur engagement contre le CPE en 2006 : « ce qui m’a donné envie d’agir, c’était la ferveur des mouvements étudiants contre le CPE. J’étais au lycée sans grandes convictions politiques et voir le mouvement de mes amis et collègues m’a donné envie d’agir et de m’informer. Je pense que cet effet de « foule » est un sentiment partagé par beaucoup. Il me semble que le nombre donne du crédit une cause », affirme Régis. Au même moment Sélyne voyait « dans le regard des autres la même envie, la même fièvre, le même appétit  d’agir. Et c’est ensemble qu’on a fait tomber le CPE ».

Ce qui nous pousse vers l’action collective est aussi un désir de changement d’échelle : parfois changer sa vie quotidienne ne suffit plus. « Jusqu’à Nuit Debout, j’avais une pratique  intime du militantisme, raconte Laury-Anne. Mais sur la place de la  République, je suis passée à une  autre échelle : j’ai lancé un journal, Gazette Debout, pour parler des  espoirs et des combats menés par les Nuitdeboutistes. J’ai alors plongé corps et âme dans les manifestations, les luttes, les alternatives. Depuis, je n’en suis plus ressortie ! »

Pour Adèle, enfin, c’est l’exemple de gens déjà en action : « Que ce soit sous la forme d’acte, de  création ou de mots, il y a chaque jour de nouveaux modes de vie qui s’inventent et transforment non seulement celui ou celle qui les  pratiquent, mais aussi ceux et celles que ça impacte.J’ai voulu m’engager dans Miroir pour rendre visible toutes ces  initiatives qui montre que l’autonomie est déjà là et qui prouve que des dirigeants, on peut s’en servir à condition de pouvoir s’en passer.« 

Vous l’aurez compris, les raisons de s’engager ne manquent pas. Elles nous ont permis de nous épanouir et nous émanciper. Chez beaucoup de gens, la raison d’agir sommeille, attendant le déclic. Le résultat de cette élection présidentielle pourrait être la vôtre. Que ce soit celle-là ou une autre, la campagne Miroir 2017 s’achève ici, mais elle reste un gisement dans lequel puiser l’idée ou le projet qui saura vous inspirer. D’autres que nous les recensent. On termine donc avec une série de plateformes qui recensent les initiatives citoyennes :

On passe à l’acteEn Communs, Semeoz,Utopies Concrètes, une cartographie de hétérotopies, la carte des alternatives de Scoop.it.

A vous de jouer maintenant !

L’équipe Miroir 2017

Crédits photos:

  • miroir2017-alternatives: miroir2017

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