100 jours à Nuit Debout : un bonheur céleste ?

100 jours. 100 jours, c’est plus qu’un quart, c’est presque un tiers d’année. 100 jours, c’est le nombre de jours pour se rendre à pied de Paris à Francfort, Toulouse ou Amsterdam. 100 c’est, selon le tarot, le Soleil, symbole d’individualité. Une individualité nuitdeboutiste dans un mouvement des multiplicités. Une individualité particulière qui fait de Nuit Debout quelque chose de spécial et original. 100 c’est aussi dans la littérature chrétienne la béatitude céleste. L’euphorie, le bonheur à l’état pur. La félicité éternelle, l’instant de sérénité par la contemplation. Mais que contemplons-nous ?

Le 100ème jour, c’est la dissolution de la Commission Napoléon II. 100 jours pour… réussir, changer sa vie, changer de vie, changer le monde, convaincre, redevenir humain, entreprendre…
Faire les 100 pas.

100 c’est le nombre jusqu’auquel on rêve d’arriver à compter étant enfant. C’est au moins autant de tentatives, d’ajustements et d’élans persévérants. Y parvenir est un moment de fierté, de plaisir et de satisfaction. Un nouveau monde de combinaisons et d’expression s’ouvre. Une fois le 100 atteint, les possibles sont infinis. Quelques règles, codes de base partagés, et nous voilà lancés. Parlant une langue et utilisant des symboles ou outils communs, davantage de place est laissée à la créativité. 100 jours pour tous.tes apprendre à compter, nous comprendre, nous écouter… Nos nombres à nous, ce sont les signes, une culture inclusive et de l’écoute, chaque personne qui compose une discussion, quelques bâches, banderoles ou papiers au sol.

100, nombre pair, nombre rond. Deux 0, sources originelles, 0 vides ou invisibles, 0 que l’on oublie, 0 que l’on évite. Un 0 en banque que l’on fuit ou que l’on désire, ne devrait-il pas être une constante ? Deux 0 précédés d’un 1. 1, symbole d’unité ? De commencement. De volonté et de créativité ? 100%. 100% remboursé, à 100%, sommes-nous à 100% ? Des centaines de personnes, qui vont et viennent, qui reviennent, qui vivent.

Galerie de Stephane Burlot

Que contemplons-nous ? Une place vivante, mouvante, dansante, chantante. Une foule de gens, d’hommes, de femmes et de personnes qui ne rentrent pas dans des cases. Des gens qui créent une brèche dans leur vie pour s’asseoir, écouter, parler et créer. Des révoltés, des déçus, des rêveurs, des utopistes, des désillusionnés espérant, des combattants qui se retrouvent et qui, peut-être, comme moi, sentent que quelque chose d’unique, de différent se produit sur cette place. Une brèche encore mince, une main tendue, un premier pas dans un engrenage encore irrégulier. Des personnes sorties de la contemplation d’une société ou d’un monde décadent, déséquilibré, défaillant ou décédant, pour agir. Comment agir ? Agir en occupant et en se réappropriant l’espace public. Agir en discutant avec l’inconnu.e, en construisant, en écoutant, en riant avec l’inconnu.e. Agir en se rassemblant pour se rendre compte que l’on n’est pas seul.es, agir en se rassemblant pour projeter, pour critiquer, pour dénoncer, pour décomposer, détruire, démonter et recommencer.

Temps court devenu long. Inconnu devenu familier. Un jour devenu mois. Des mois vers des années ?

Les choses, les idées et les amitiés naissent et prennent corps dans un passé et un contexte plus ancien, leur donnant un goût d’éternité et de passé commun. Presque une sensation d’universalité. Des ressentis, sensations et amitiés bruts. Comme un socle commun aplanissant les méfiances et autorisant la confiance, Nuit Debout teste ses frontières, se stabilise tout en gardant cette fragilité et cette malléabilité.
En écrivant, je me rends mieux compte de la rapidité des événements. Et de la dimension exponentielle de ces derniers. Comme un accélérateur temporel et déformateur spatial, Nuit Debout a permis ces rencontres, projets, et leur intensité. Une toile se tisse. Des ponts se forment. Maintenant que nous savons compter jusqu’à 100 ensemble, de nouveaux liens se créent, et de nouvelles images se forment.

Manon P.

Pour assister aux 100 jours de Nuit Debout, rendez-vous sur Facebook.

Crédits photos:

  • Assemblée Générale, 8 mai, République: Stephane Burlot
  • Orchestre Debout (2): Stéphane Burlot / DR

2 réactions sur cet article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *