Attac : L’évasion fiscale nuit gravement à la santé

Samedi 26 novembre, 11 heures du matin. Une cinquantaine de militants d’ATTAC pénètrent dans une agence de la banque BNP Paribas, Boulevard Sébastopol (Paris3e). Ils portent des blouses blanches de médecins et poussent des « malades » en fauteuils roulants. A l’intérieur, ils déploient leurs banderoles et chantent des slogans, accompagnés par les musiciens de la Fanfare Invisible : « L’évasion fiscale : autopsie d’un crime social ».

En quelques minutes, les militants d’ATTAC ont transformé symboliquement cette agence bancaire en salle de soins, afin de dénoncer la casse du système de santé français. Car les 60 milliards d’évasion fiscale qui s’échappent des caisses de l’Etat pourraient combler 15 fois le trou de la sécurité sociale.

L’association fait ainsi d’une pierre deux coups : elle poursuit son combat contre les magouilles du monde de la finance et met en lumière la souffrance du personnel hospitalier, fortement mobilisé ces dernières semaines.

Attac évasion fiscale BNP
Attac évasion fiscale BNP

Le cancer de la dette, l’hémorragie fiscale, l’insuffisance pénale et la fracture sociale : les quatre maladies dont souffre le corps social sont dessinées sur une silhouette humaine, déployée sur une toile au milieu de la banque.

Face à ce « patient », plusieurs « docteurs » viennent établir leur diagnostic. Jean Vignes, Secrétaire Général de SUD Santé Sociaux, estime «  qu’il faut abandonner le plan triennal de 3,5 milliards d’économies sur les hôpitaux et mettre au coup d’arrêt au programme de fermeture de 16 000 de lits et de suppression de 22 000 postes dans la fonction publique hospitalière ». Murielle Guilbert, de Solidaires Finances publiques, rappelle que « 60 à 80 milliards d’euros échappent chaque année au budget de l’État du fait de la fraude et de l’évasion fiscale alors qu’avec seulement 2,5 milliards d’euros, on pourrait financer les 20 000 emplois qui disparaissent chaque année dans le secteur de la santé. » L’argent pour des conditions de travail décentes et des soins de qualité existe, il est dans les paradis fiscaux !

En faisant le lien entre l’évasion fiscale et le financement des urgences sociales et écologiques, Attac entend démontrer que des solutions crédibles existent. « Alors que la fraude aux prestations sociales représente 60 fois moins que la fraude fiscale, elle est de plus en plus traquée et stigmatisée. Les fraudeurs fiscaux, quant à eux, bénéficient d’un traitement de faveur et ne sont quasiment jamais condamnés. Nous pouvons lutter concrètement contre cette impunité fiscale : en renforçant les effectifs et les moyens de l’administration fiscale, de la police fiscale et du parquet financier qui traquent la délinquance financière mais aussi en condamnant plus systématiquement les fraudeurs et leurs complices, les banques et les cabinets d’affaire. Si des dizaines de milliards d’euros échappent encore au fisc annuellement, c’est uniquement le résultat de décisions politiques », rappelle Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac France.

Face à la valse des milliards d’euros dans les discours des militants, il n’est pas toujours facile se rendre compte de la dimension des choses. Mais le rapprochement avec le secteur de la santé permet de comprendre ces effets d’échelles.

Pendant que les militants continuent leurs discours, certains clients tentent d’arriver jusqu’au comptoir. Gilles – un ancien de convergence des luttes de Nuit Debout – tient le rôle de médiateur et s’efforce de leur frayer un chemin dans la foule. « Nous ne sommes pas contre les salariés de la banque mais contre le système », explique-t-il. « Le but n’est pas de faire un blocage mais une occupation. Cela nous permet d’éviter d’être attaqués pour entrave à la liberté de travailler », renchérit une militante.

Bien évidemment, les opérations d’ATTAC sont loin d’être appréciées par les banques. Le 19 octobre 2015, 41 militants du collectif « faucheurs de chaises » avaient réquisitionné 14 chaises d’une agence BNP pour dénoncer l’évasion fiscale. L’un d’entre eux, Jon Palais comparaîtra devant le tribunal de Dax le 9 janvier 2017 pour vol en réunion.

Depuis, les employés de la BNP ont des consignes. Ne pas s’opposer aux militants et appeler la police. Celle-ci est arrivée dans la banque une quarantaine de minutes après le début de la manifestation d’ATTAC. Les policiers ont fait un rapide tour avant de repartir sans broncher. Les discours se poursuivent et la mise en scène de ce « spectacle » se termine avec un « patient » victime d’évasion fiscale amené sur un brancard pour un « massage cardiaque ». Il revient à lui grâce à des dizaines de coupures de (faux) billets de 100 euros. Une mise en scène créative, drôle et surtout pédagogique. « Tout cela aura demandé trois semaines de travail », explique Youlie, une militante d’ATTAC, également ancienne de Nuit Debout.

Après une petite heure de performance, les militants quittent l’agence, toujours dans le calme et la bonne humeur, au son de la fanfare. Gilles, le médiateur, salue le directeur de la banque qui lui demande : « vous prenez vos décorations en partant ? ».

Il ne restera que quelques centaines de confettis qui parsèment le sol. Bien loin des milliards d’euros blanchis chaque année par la BNP.

L-A

Crédits photos:

  • Attac opération devant BNP: Gazette Debout

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