800 Avenue de Flandre : Ceci n’est pas une adresse

Le 800 avenue de Flandre n’est pas une adresse. C’est un nombre qui symbolise la quantité d’enfants, de femmes et d’hommes qui campent ici entre deux expulsions. Un nombre grandissant, dont l’ampleur doit nous alerter.

Chaque matin ou presque la « jungle » de Paris est rasée par des monstres mécaniques. Ici, le son des pistons qui réveille le quartier n’est pas celui des camions de poubelles mais celui d’énormes tracteurs déplaçant les abris qui, le temps d’une nuit, offraient un toit aux exilé-es- maintenant sans-logis.

Le matin, lorsque l’on y ouvre les yeux, des agents de police et de la gendarmerie, des cars et des camionnettes sont alignés sur le trottoir.  Ils n’apportent pas le café, peut-être n’ont-ils même pas eu le temps de prendre le leur. Ce qui expliquerait, sans doute, leur mauvaise humeur. Quand tu ronfles, ils te raflent. Les exilé-es doivent alors rassembler leurs affaires personnelles pour ne rien perdre. Le peu qu’ils possèdent tient dans deux sacs. Les bennes se remplissent, les cars aussi. Des familles séparées, des ami.e.s perdu.e.s. Inlassablement, la violence devient routine, sourde et étouffée par le bruit des machines. Le cri d’alerte ne dépasse plus le cordon de CRS qui l’encercle.

Certain.e.s disparu.e.s reviendront vite, sûrement remis.e.s à la rue. D’autres resteront au poste de police. On leur distribuera alors une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF). Direction le CRA (Centre de Rétention Administratif), avec ses murs froids et ses fenêtres barrées de fils barbelés. Un mois de sursis avant l’expulsion dans des conditions déplorables, bien loin des regards de la population. Certain.e.s ne reviendront pas avant un moment, ceux qui ont été renvoyés au pays dans lequel ils ont pour la première fois foulé le sol européen. En effet, la procédure de Dublin impose aux exilés de faire leur demande d’asile dans le pays de l’Union Européenne où ils sont arrivés.  

Un exilé dort dans la rue à Stalingrad.
Un exilé dort dans la rue à Stalingrad.

L’invisibilisation du pire : des associatifs en grève depuis trois semaines

Les premiers témoins de ce traitement sont les associations. Elles travaillent quotidiennement à la réinsertion des exilé.e.s, à trouver des vêtements, nourrir et prodiguer des soins. Elles essayent de proposer d’autres méthodes, plus humaines, demandant plus de temps et d’investissement. Des bénévoles proposent d’héberger des exilé.e.s chez eux avec l’aide des associations. Une aide bienvenue, bien qu’incomplète, car ces gîtes citoyens offriront un foyer pour une durée incertaine.

Aujourd’hui la répression policière est telle qu’il est devenu quasi impossible pour les associations d’aller sur le terrain pour aider les exilé.e.s. Les expulsions empêchent de bien connaître les populations et d’engager un travail sur la durée. Quelques associations sont en grève depuis trois semaines, amplifiant malgré elles la crise. D’autres au contraire ont intensifié leur maraudes et leurs distributions de nourriture. Des militant.e.s et voisin.e.s tentent d’organiser des cours de Français ou des soupes populaires. Certain.e.s même n’hésitent pas à aller camper avec les exilé.e.s. Tant bien que mal, beaucoup se mobilisent pour essayer d’apporter de l’aide, de la solidarité et du lien social.

Un exilé dort dans la rue à Stalingrad.
Un exilé dort dans la rue à Stalingrad.

Que font les pouvoir publics ?

Les infrastructures issues de mesures à court terme sont saturées. Elles n’offrent plus des conditions de vie salubres, ne respectent plus les droits de l’homme. Les mairies expulsent tout.e.s les sans-logis, tout.e.s les exilé.e.s. Les associations ne bénéficient de presque aucun appui de l’État. Enfin, les initiatives citoyennes sont souvent réprimées par les forces à l’ordre. Quel est le sens de cette politique qui oublie ou nie l’intégrité humaine, le partage des cultures, l’entraide citoyenne et le vivre ensemble ?

Que peuvent faire les médias ?

Si tu es équipé d’une carte de presse, bouge, viens sur place, ça remue le ventre. 

Que peuvent faire les associations ?

Revenez sur le terrain, nous allons porter votre message ! Pour celles et ceux en grève face à la répression policière, comptez davantage sur le soutien des bénévoles pour rendre visible votre travail. L’absence d’acteurs clefs sur le terrain a de réelles conséquences sur les conditions sanitaires et de précarité de ceux et celles laissée.e.s à la rue.

Que peuvent faire les citoyens ?

Ne nous regardez pas, ne soyez plus indifférent.e.s, rejoignez nous, certain.e.s d’entre nous y dorment, y font des maraudes, certain.e.s organisent des récupérations alimentaires pour faire fonctionner des cantines populaires. D’autres donnent des cours de français et jouent avec les enfants. Notre place à tous est aujourd’hui aux côtés de ceux qui ont tout laissé pour fuir le pire. Retrouvez d’autres infos pour aider les exilés dans cet article.

 

Un exilé dort dans la rue à Stalingrad.
Un exilé dort dans la rue à Stalingrad.

Samedi 10 septembre, un Nuitdeboutiste a passé la soirée avec les exilés. Vous pouvez retrouver ses interviews sur son périscope. 

Pour une plongée dans la vie quotidienne des exilés, retrouvez nos chroniques de Stalingrad.

Crédits photos:

  • Les affaires des exilés dans la rue à Stalingrad: Nicolas DR
  • Un exilé dort dans la rue à Stalingrad: Nicolas - DR
  • Un exilé dort dans la rue à Stalingrad: Nicolas - DR
  • Un exilé dort dans un lit d’enfant dans la jungle de Stalingrad.: Nicolas - DR

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