Lettre ouverte à mes parents sur la violence subie

TRIBUNE — VOICI UN MESSAGE QUE J’AI FAIT PARVENIR A MA FAMILLE DANS L’OUEST, QQ PART ENTRE ANGERS ET RENNES.

Bonjour, ce matin, j’ai la nausée, ras le bol des violence subies par tou.te.s les copain.ine.s et qui m’envahissent l’âme, la colère dans les tripes, j’écris ce message pour partager avec vous et ceux que je n’ai pas l’occasion de voir, ma famille, amis de la famille et proches, partagez-leur ce message.

Je sais que vous avez été choqués par la voiture de police attaquée et brûlée, et il n’y a là rien à justifier, ni à analyser, trois crétins isolés en réalité qui sont venus produire les plus belles images de propagande que le pouvoir aurait pu imaginer. Mais, à titre personnel, moi qui ne suis pas un « casseur », ou « manifestant offensif », je n’ai jamais pris autant de gaz lacrymos dans toutes les manifs, dans toutes les occupations, régulièrement sans sommation, souvent par provocation, pour lancer l’affrontement. Oui, désormais je « m’équipe pour aller en manif », foulard et citron contre les gaz asphyxiant, sérum phy pour les yeux, même récemment ma coquille de sport après avoir vu dans une vidéo un type lambda se prendre un tire tendu de grenade dans les parties.

Lettre ouverte violences (2)
 

J’ai vu les Nuits debout, le 1er mai ou plus de 1000 personnes assises à discuter, tandis que 500 autres écoutaient un concert de l’autre côté de la place, se faire harceler à la lacrymo, jusqu’à ce que la colère explose. La grenade de « décencerclement » est devenue une arme offensive, la police la lance directement sur les manifestants, le plus souvent acculés (« nassés »), et ça fini avec des éclats dans les jambes, où la tête pour un journaliste dans le coma depuis une semaine.

Avez-vous déjà oublié Rémi Fraisse, ce jeune écologiste tué à Sivens ? La justice d’Etat tente d’étouffer l’affaire plus certainement que les larmes de deuil de sa famille. Ne vous trompez pas, Rémi, c’est moi, c’est nous, manifestants lambda, au mauvais endroit, au mauvais moment, ce moment où la répression bascule dans l’état de guerre contre les civils.

Lettre ouverte violences (3)

Certain.e.s parmi les manifestants sont effectivement décidé.e.s à ne pas se laisser faire, à répliquer même avec des moyens en réalité ridicule (quelques canettes et bouts de bitume), mais n’a-t-on jamais vu chez nous la population se défendre contre l’enfouissement de déchets nucléaires à quelques kilomètres de la maison, mes oncles agriculteurs s’en prendre à une préfecture, tout cela est même allé jusqu’à l’incendie du parlement de Bretagne par les pêcheurs… Est-ce que la population locale s’est retournée contre eux, les a-t-on traités de voyous, de « preneurs d’otages » ? Tabassés et mis en prison après comparution immédiate, cette parodie de procès ? Non, ce n’est pas arrivé, et vous n’auriez peut-être pas laissé faire.

Pourtant, aujourd’hui, ce sont vos enfants, des jeunes et moins jeunes, garçons et filles, qui subissent une violence que vous n’imaginez sans doute pas, que vous ne voyez pas à la télévision (c’est l’art du montage et de la propagande), une violence qui prend pour prétexte une minorité pour frapper la majorité, qui s’attaque aux journalistes indépendants aussi, à toutes et tous en fait, comme de vulgaires terroristes avec qui l’amalgame est lâché sans honte.

Lettre ouverte violences (4) ACAT

En réalité, cette violence est dirigée contre celles et ceux qui refusent de se laisser soumettre, d’abandonner leur avenir à des financiers, et qui défendent les dernières parcelles d’une certaine fierté de travailleurs, si chère à votre génération. Tou.te.s ont en commun d’avoir décidé de ne plus se laisser tondre la laine sur le dos sans rien dire. Et vous, ça ne vous démange pas un peu ?

 Votre fils, debout sous la tempête, la tête dur comme un breton !

Crédits photos:

  • Lettre ouverte violences (2): Nuit Debout / DR
  • Lettre ouverte violences (3): Nuit Debout / DR
  • Lettre ouverte violences (4) ACAT: ACAT / DR
  • Lettre ouverte violences (1): Nuit Debout / DR

6 réactions sur cet article

  • 4 juin 2016 at 13 h 50 min
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    j’apprécie ton témoignage puisque mon fils est aussi dans ces manifs et parce que moi aussi lorsque je suis sur Paris je vous rejoins….. J’apprécie d’autant plus que tu ne justifie pas le fait de ressembler aux barbares pour défendre nos causes….. Nous ne sommes pas des casseurs y compris lorsque nous décidons d’une action qui peut utiliser des moyens violents car nous ne nous attaquons pas aux hommes…. Nous ne nous dressons pas contre le flic bon père de famille et bon fonctionnaire qui tient son rang dans le respect de celui qui est en face et qui peut être son fils sa file son frère sa soeur. Nous ne les confondons pas avec ceux qui tirent à bout portant et qui nous visent pour nous abattre…… cependant il nous faut fourbir nos armes idéologiques nos discours nos images pour que ces « bons fonctionnaires » enfin agissent selon le principe « des baïonnettes intelligentes ». Je le rappelle:
    « Lorsqu’un ordre contraire aux principes républicains ou dangereux pour la vie de ses concitoyen est donné il a le devoir de refuser de l’appliquer! » Donc mesdames et messieurs les CRS et gendarmes mobiles intelligents intègres et républicains refusez d’utiliser les armes de guerre mises entre vos mains…. Déposez les devant vous ôtez vos casques et vous constaterez que nous manifestons pacifiquement afin que tous nous puissions échapper à la régression sociale organisé par Valls et le grand patronnât!

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  • 5 juin 2016 at 12 h 29 min
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    Le fait que le texte passe d’abord par une critique de la voiture brûlée (sans évoquer une seule fois l’extrême gravité des poursuites engagées à l’encontre des suspectEs, et donc Sans se solidariser des prévenuES) me semble reproduire et reconduire la violence d’État qu’il prétend dénoncer. Grmf

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    • 6 juin 2016 at 10 h 04 min
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      Il y a deux choses à distinguer : l’image de la voiture incendiée par trois personnes masquées et ce que cela a produit comme tort dans l’opinion publique envers le mouvement et qui amène à un minimum d’auto-critique politique ; et de l’autre, les pseudo poursuites contre des personnes jusqu’à ce jour protégées par la présomption d’innocence, et dont rien n’indique qu’elles soient les responsables. Ma solidarité irait envers ces personnes s’il s’avérait qu’elles aient été transformées en bouc émissaires, et qu’elles n’aient pas le droit à un procès équitable, comme il y en a tant en ce moment (Affaire Bagelstein à Rennes). Cela n’empêche pas de réfléchir en revanche sur les conséquences de la montée en violence, sur l’engrenage qui fait que pas mal de copains se retrouvent blesser, et dont la voiture de police brûlée renverse la perception de manifestants harcelés (et qui se défendent), à l’image que voulait construire l’Etat et la police, à savoir d’une « défense légitime » des forces de l’ordre face à des agresseurs. C’est le but de ma dénonciation initiale, je ne suis pas à l’offensive contre la police, mais cela n’empêche pas d’être victime d’une terrible répression, aveugle et belliqueuse, qui vise l’ensemble du mouvement social. C’est ce que je voudrais rétablir, et ne plus entendre « Si tu te fais gazer, c’est que tu l’as bien cherché » dans la bouche de mes proches.

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  • 9 juin 2016 at 18 h 29 min
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    Des violences policières ? Les pauvres flics ne peuvent bientôt plus se défendre… Vous êtes ridicules ^^

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  • 9 juin 2016 at 18 h 31 min
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    Vous êtes ridicules

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    • 10 juin 2016 at 1 h 52 min
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      Merci.

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