Nuit Debout, un samedi après-midi devant la statue

PORTRAIT – Elle danse, grande, effilée, musclée, solide, sur une compilation musicale assez douce. C’est une danseuse, elle va, vient, virevolte, saute, s’arque-boute, court, se déchaîne, ralentit, occupe l’espace au pied de la statue. Toute à sa danse, elle ne fait pas attention à l’homme aux yeux rieurs qui vient la rejoindre.

Il est simiesque, un éternel sourire aux lèvres, alcoolisé du matin au soir, vêtements et hygiène de SDF. Un peu balourd, il s’approche de la danseuse, trop près, il se met dans sa danse, dans son mouvement, il fait des révérences en ôtant son chapeau, qu’il tient à bout de bras, pour saluer amplement celle qui le met en rêve.

Elle continue à danser, imperturbable; elle ne fait pas de lui son complice, mais ne le rejette pas. Elle sait qu’il est là, heureux de bouger sur la musique, il l’entoure, suit ses mouvements et sourit. A qui, à quoi ? A la vie, à la beauté de la danse, à l’amour forcément.

Jamais elle ne se laisse perturber par cette présence imprévue. Son regard l’ignore mais son être l’accepte. Et leurs corps, sans se toucher, s’apprivoisent.

Lui est souple, généreux, amoureux  et heureux le temps d’une danse.

Il s’appelle Philippe, je le connais depuis 20 ans et le retrouve à l’occasion de luttes et mouvements. Il a la patate, squatte où il peut, boit du matin au soir et arrive à garder cet amour de la danse. Chapeau, l’artiste !

Elle, je ne la connais pas. Chapeau l’artiste !

Edwige Thaille

Crédits photos:

  • Collages_1_11: Stéphanie Pouech / DR

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