En finir avec la démocratie 49.3 : grève générale et sortie de la Vè République !

VIE DE LA NUIT – Dans le cadre d’une série de débats « Comment gagner », la commission Convergence a reçu le week-end dernier sur la place de la République trois intervenants sur le thème « En finir avec la démocratie 49.3 ». Deux mots d’ordre : grève générale et nouvelles institutions.


Marlène Benquet, sociologue, chargée de recherche au CNRS, a ouvert le débat en évoquant les liens étroits entre élites politiques et patronat. Pour elle, alors que l’État social-démocrate devrait être un tiers médiateur, au-dessus des rapports de force, il est intimement lié aux dirigeants du monde économique. En effet, ces élites fréquentent les mêmes grandes écoles (HEC, Polytechnique, ENA…etc) et fréquentent les mêmes cercles ou think tanks (Le Siècle, l’Institut Montaigne, Terra-Nova). Ils passent ensuite de l’économie à la politique – ou inversement – durant leur carrière. Et de citer les cas d’Emmanuel Macron, Michel Pébereau ou Francis Maire. L’État tel que nous le connaissons est favorable à l’accumulation du capital et fixe des règles qui la permettent.

Pour la sociologue, il est faux de prétendre que l’État est affaibli, c’est au contraire lui qui a fixé toutes les règles induisant la financiarisation de l’économie en Europe. « Le néolibéralisme, c’est plus d’Etat au service du patronat financier », affirme-t-elle. « L’État est ainsi un État de rapport de forces structurellement anti-démocratique. Le projet européen est de constitutionnaliser l’ultra-libéralisme », poursuit-elle. Comment faire, sachant que l’État produit ainsi un rapport de force ? Pour Marlène Benquet, la stratégie électorale est vouée à l’échec et l’unique levier d’action est de se mobiliser pour inverser le rapport de force capital-travail par la grève générale.

Galerie Borenstein

À son tour, Frédéric Lemaire, docteur en économie, membre du conseil d’administration d’Attac France (Officiel), a ensuite confirmé le rôle salvateur de la grève générale. « Depuis la crise de 2008, on assiste à la mise en place de mesures d’austérité brutales un peu partout en Europe ». Pour lui, la loi travail s’inscrit dans cette surenchère au nom de la compétitivité. Elle a été imposée par le 49.3 au mépris de la démocratie comme le furent les réformes en Grèce. « Mais il y a une autre dynamique européenne, celle des réveils des mouvements sociaux un peu partout : au Royaume-Uni, en Espagne, en Grèce, en Roumanie…. Et les victoires sont à portée de main », conclut-il avant de citer le cas du CPE.

Gabarits tags
Gabarits tags

La grève générale est un outil qui pourrait bloquer toute l’économie et mettre en échec le gouvernement. Certes, les organisations syndicales ont moins d’emprise que par le passé, mais en 1936 et en 1968, elles ont rejoint des mouvements de la base préexistants. La manifestation contre la loi travail a permis de fédérer des personnes isolées et de construire un NOUS. Un intérêt collectif est né, il est porteur et ce n’est qu’un début. Maintenant il s’agit de donner à voir la réalité de toutes les luttes (hôpitaux, chômeurs, auto-entrepreneurs…), de les cartographier pour créer le sentiment d’une lutte commune et de prendre conscience de nos forces, jusqu’au blocage général. Au passage, Attac initie le 20 mai une action de blocage et de désobéissance civile devant le MEDEF que les nuitdeboutistes doivent rallier.

Manif 1 mai (1653)
Manif 1 mai (1653)

Enfin, Anne-Cécile Robert, co-présidente de l’association “Pour une constituante” et membre du comité de rédaction et du directoire du Monde diplomatique s’est exprimée sur la sortie nécessaire de la Vè République, dont les institutions sont propices aux dérives autoritaires. « Recherche de justice sociale et approfondissement de la démocratie convergent », affirme-t-elle. L’oppression sociale violente que nous connaissons est permise par le fait que nous ne sommes plus vraiment en démocratie. « Le 49.3 n’est pas un accident mais le résultat d’un processus engagé il y a au moins 30 ans ». Processus qui a remis en cause le peuple souverain. « Et je m’étonne qu’on ne fasse pas plus référence à 1789 ces temps-ci ».

Le peuple souverain a en effet été de plus en plus marginalisé par la construction européenne ou par les discours sur la compétence des dirigeants, qui est une façon de dire aux citoyens de laisser la place aux experts. D’où tous ces rapports d’experts qui prônent toujours plus de libéralisme. Ainsi, la parole des citoyens est délégitimée et sommée de laisser la place à des technocrates non élus. « Nous sommes dans une situation similaire à 1789 où nous devons reprendre la souveraineté », lance-t-elle. Avant de conclure : rien n’étant possible dans le cadre de nos institutions actuelles il faut élire une Assemblée Constituante et réorganiser les institutions comme l’avait fait le Conseil National de la Résistance (CNR). Une pétition est disponible sur change.org.

Retrouvez le lien de l’enregistrement du débat précédent: « Quelles nouvelles formes de grève pour vaincre la Loi Travail? » (piste 46).

Crédits photos:

  • Galerie Borenstein: Daphné Borenstein/DR
  • Gabarits tags: Floryan Reyne
  • Manif 1 mai (1653): Nuit Debout/DR
  • Contre la privatisation de l’espace public: Stephane Burlot / DR

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