Nuit Debout se déplace dans les beaux quartiers pour soutenir les lanceurs d’alerte

REPORTAGE – En soutien au lanceur d’alerte Antoine Deltour (scandale Luxleaks) et pour dénoncer l’impunité fiscale des puissants, la commission Économie politique et tous les participants volontaires de Nuit Debout se sont déplacés devant l’ambassade du Luxembourg le mercredi 4 mai. Objectif : déranger le pouvoir là où il se trouve. C’est ainsi qu’une cinquantaine de Nuitdeboutistes ont déboulé au son de « Luxembourgeois t’es foutu / Nuit Debout est dans ta rue ».

La manifestation a accueilli Eric Alt (magistrat spécialiste de la lutte contre la corruption, membre des associations Anticor et Sherpa) et Alain Bocquet (sénateur PCF, membre de la Commission des Finances et spécialiste des questions d’évasion fiscale).

Le rappel des faits

Antoine Deltour est un lanceur d’alerte actuellement en procès au Luxembourg pour avoir permis la révélation du scandale des Luxleaks : l’État du Luxembourg a sciemment organisé, au cœur de l’Europe, « l’optimisation fiscale » de grandes firmes multinationales, avec à la clef des milliards perdus pour les finances publiques. « Cette perte, qui est aussi importante qu’une bonne partie de la dette publique pour laquelle on nous fait chanter, est due notamment aux agissements de Jean-Claude Juncker, alors premier ministre du Luxembourg et désormais président de la Commission Européenne ! », s’exclame la commission Économie de Nuit Debout. Antoine Deltour est accusé de vol, blanchiment, accès frauduleux dans un système informatique, violation du secret des affaires et du secret professionnel. Il risque jusqu’à cinq ans de prison et 1,25 million d’euros d’amende.

Lanceurs d'alerte (2)
Lanceurs d’alerte (2)

Deux intervenants pour les Nuitdeboutistes

Alain Bocquet a tout d’abord rappelé l’ampleur des sommes concernées par « l’optimisation fiscale » : chaque année, 60 à 80 milliards d’euros manquent au budget de l’État français, dont le déficit est actuellement de 73 milliards. Il a ensuite évoqué l’extrême complexité structurelle des sociétés-écrans servant à détourner ces sommes, et a enfin souligné la grande proximité qui existe entre les milieux politiques et financiers.

On se souviendra par exemple de l’affaire Cahuzac. Pour le sénateur, il y a trois types de solutions : la transparence (à laquelle aident les lanceurs d’alerte), l’harmonisation fiscale et une volonté politique forte là où règne actuellement un double discours. Les lanceurs d’alerte doivent être protégés par un statut, insiste-t-il – une indemnisation notamment. Seule une forte pression populaire sur les élus permettra de changer les choses. L’esclavage a été aboli, pourquoi pas le secret fiscal ?

C’est ensuite le magistrat Eric Alt qui s’est exprimé, en mentionnant qu’Anticor, qui lutte contre la corruption et pour l’éthique en politique, a cette année décerné le prix Éthique à Antoine Deltour.

On peut se poser la question de savoir si le Luxembourg n’est pas déloyal vis-à-vis des autres pays membres, et s’il ne pourrait pas être poursuivi, affirme-t-il. »Nous savons maintenant le Luxembourg a déclaré la guerre à l’égalité devant la loi, à l’égalité devant l’impôt, à la liberté d’expression et donc aux valeurs fondamentales inscrites dans notre Déclaration des droits de l’homme. Face à un tel mépris, la Déclaration des droits de l’homme de 1789 rappelle que la résistance à l’oppression est un droit naturel et imprescriptible« .

Pour le magistrat, comme pour le sénateur, une forte pression citoyenne peut changer la donne.

En soutien à Antoine Deltour et pour protéger les lanceurs d’alerte vous pouvez signer et partager la pétition sur powerfoule.

Magalie

Crédits photos:

  • Lanceurs d’alerte (2): Magalie
  • Lanceurs d’alerte (1): Magalie

3 réactions sur cet article

  • 5 mai 2016 at 19 h 05 min
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    Bravo à Magali pour cet article clair et pédagogique et Bravo à ceux qui sont allés au Luxembourg. On en peut vraiment plus de cette »optimisation » fiscale.

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    • 7 mai 2016 at 19 h 26 min
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      merci 😉 je peux encore faire qq progrès sur la pédagogie : j’aurais dû préciser c’était bien l’ambassade du Luxembourg mais… à Paris 😉

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  • 5 mai 2016 at 19 h 06 min
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    Bravo à Magali pour cet article clair et pédagigique et bravo à ceux qui sont allés au Luxembourg. Ras le bol de cette  » optimisation » fiscale

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