Nuit Debout : reportage à la Nuit lyonnaise

Une cohorte d’ouvriers, d’employés, de cadres venus à la recherche d’un emploi ou pour une réunion politico-syndicale. Voici la fresque qui orne la façade de la Bourse du Travail, place Guichard dans le IIIe arrondissement lyonnais.

Une allégorie picturale totalement appropriée pour un lieu qui accueille depuis samedi 9 avril la Nuit Debout lyonnaise.

Les participants sont plutôt bien disciplinés. La veille des jours de marché, ils replient leur matériel pour laisser la place propre aux commerçants qui viennent travailler les mardis et les dimanches matins.

Ils ont installé des toilettes sèches et un urinoir, directement relié aux égouts. Mais ce n’est pas toujours facile de trouver un lieu pour le compost. Certains s’activent pour contacter des centres équestres et des jardins partagés urbains. « On peine à trouver des gens qui veulent récupérer ce compost un peu particulier », sourit l’une des bénévoles.

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L’urinoir de la Nuit lyonnaise

Côté poubelles en revanche, les participants ont été étonnés du retrait des conteneurs à verre, pourtant installés bien avant leur arrivée. Ils tâchent de récupérer toutes les bouteilles vides dans un grand caddie afin de tout jeter dans un autre conteneur quelques rues plus loin. « C’est un vrai handicap pour un tel événement. Mais on s’organise pour laisser l’endroit propre », confie un autre bénévole.

Un peu plus loin, le stand cuisine laisse échapper une bonne odeur. Grégory, cuisinier de métier, mitonne depuis une semaine pour les nuitards. Il reçoit beaucoup de produits bio des maraîchers de Saint-Cyr-au-Mont-d’Or. Les boulangers rapportent du pain frais tous les jours. La Mairie l’autorise à faire un peu de feu, de quoi cuisiner des plats chauds.

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Grégory, le cuisto de la Nuit devant ses fourneaux

Ce soir, Grégory s’estime assez gâté : il a reçu une belle cargaison de côtelettes de porc, de saucisses et de merguez. Un chariot entier rapporté par Hadrien. Casque de vélo vissé sur la tête, ce garçon écume les bennes des supermarchés pour trouver les invendus du jour. « Hier nous avons récupéré cinq kilos de raviolis frais et des produits laitiers. Ce que nous apportons complète bien les dons des maraîchers. »

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Les provisions de la Nuit Debout

La place se remplit doucement en ce samedi de vacances scolaires. Jeudi, près de 1500 personnes sont venues, certaines restant jusqu’à 3 h du matin. Le vendredi, un bal folk a été organisé avant les débats.

L’ambiance est particulièrement bon enfant. D’ailleurs, aucun policier ou CRS ne traîne aux abords de la place. Certains m’assurent que des policiers en civil surveillent discrètement l’événement. Mais qu’importe. La Nuit lyonnaise est calme et surtout se termine chaque soir sans nuages de gaz lacrymogène.

La commission Sérénité a d’ailleurs été dissoute. « Les gens nous percevaient un peu comme un service d’ordre avec nos talkies-walkies et nos oreillettes. Du coup lundi, on a décidé de ne rien faire et tout s’est bien déroulé », explique Jordy, l’un des anciens membres de la commission Sérénité. Un bel exemple de discipline pour un mouvement qui fait l’apologie de l’autorégulation.

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Le mode d’emploi pour participer à la Nuit.
Très pratique pour orienter les nouveaux venus.

Au fil de la soirée, une question me taraude : pourquoi la Nuit lyonnaise est-elle si paisible ? Certains ont évoqué quelques manifestations sauvages, mais rien de comparable à Paris.

« Nous sommes beaucoup moins nombreux qu’à Paris et la place Guichard n’est pas un lieu de passage, contrairement à celle de la République », me confie Céline. Le mouvement aurait certainement été moins bien toléré par les autorités s’il avait été installé place Bellecour ou place des Terreaux.

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La pluie n’a pas empêché de nombreux Lyonnais de venir
samedi soir 16 avril place Guichard à Lyon

L’écrivain Khal Torabully a également son idée sur le sujet. « Lyon est une ville pragmatique et ses habitants ont peut-être un petit côté britannique. Il y a aussi un caractère plus intériorisé peut-être dû à sa topographie, entre deux fleuves et deux collines. »

Maxime, notamment dans le comité Organisation, est ravi de cette philosophie pacifiste. « Nous sommes ici pour produire de la résistance, et non pas une révolte. Nous voulons faire émerger quelque chose de nouveau dans cette convergence des luttes. »
L’arrêté préfectoral permet à la Nuit lyonnaise d’occuper la place jusqu’au 22 avril. Une date buttoir qui n’inquiète personne. « Si nous sommes délogés, nous trouverons un autre endroit. Mais nous n’arrêterons jamais. »

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Ateliers de ces derniers nuits

La Gazette. 

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